17 juin 2003
La grande famille des Dames n'a rien de bien féministe si l'on en croit l'étymologie qui en rapprocherait le patronyme de l'allemand ou du néerlendais dam qui signifie rempart, barrière ou digue (comme dans Amsterdam). D'ailleurs, c'est une fois franchie la barrière de l'ennemi que le pion devient dame et voit croître ses pouvoirs.
On assimile au jeu de dames tous les jeux se déroulant sur un plateau découpé en cases et dont les pièces ont la même valeur. Des jeux de ce genre ont été retrouvés dans les pyramides.
Quoique son origine ne soit pas précisément connue, le jeu de dames est un des jeux les plus répandus au monde; mais il est cependant pratiqué sous plusieurs formes. Le premier volume sur le jeu (64 cases) fut publié en 1547 à Valence par Anton Torquemada.
La forme la plus populaire est sans doute le jeu international comportant 100 cases (10 par 10) et opposant 20 pions de chaque côté. Le premier volume sur le jeu international fut publié en 1650 par Juan Garcia Canagelas de Grenade. Aussi appelé jeu polonais ou dames à la polonaise, le jeu international est apparu en France au XVIIe siècle et s'imposa grâce au célèbre traité de Manoury publié en 1770. Napoléon Bonaparte fut un bon joueur et laissa d'ailleurs son nom à un coup qu'il prit lors d'une de ses parties: le coup Napoléon.
Le premier champion du monde reconnu est le Français Isidore Weiss (en 1899). Les Français ont d'ailleurs dominé jusqu'en 1947, suivi des Néerlendais et des Soviétiques. La Fédération Mondiale du Jeu de Dames (FMJD) a été fondée en 1947.
Le jeu International au Canada:Les francophones d'Amérique du Nord pratiquaient presqu' exclusivement le jeu canadien (144 cases). Ils avaient des nouvelles de l'Europe via les journaux et revues spécialisées sur le jeu de dames et connaissaient le jeu international mais aucune compétition n'avait lieu ici pour ce jeu. En octobre 1905, voici ce que le cahier de Roma Lavallée mentionne: <<L.-O. Maillé qui avait lancé des défis à tout joueur au monde, sur les 2 damiers, depuis assez longtemps, attend une réponse de I. Weiss, champion d'Europe, d'ici la fin du mois, ou se déclarera champion de l'univers.>>. Novembre 1905, L.-O. Maillé se déclare ...champion mondial (rien de moins!). Ce ne fut pas la seule occasion où les Canadiens ont cherché à se mesurer aux champions du 100 cases. En 1914, la guerre empêcha le Français Marcel Bonnard et le Néerlendais Herman Hoogland (alors champion du monde) de venir à Montréal se mesurer à nos champions.
La première rencontre entre les deux mondes eut lieu finalement en octobre 1923. William Beauregard, alors qu'il était champion d'Amérique, eut l'honneur de se mesurer au champion d'Europe (au jeu international), le Néerlendais Benedictus SPRINGER. Ce dernier accepta un match pour le titre mondial en 10 parties, 5 au jeu canadien et 5 au jeu international. Beauregard, un résident de Holyoke (Massachusetts) confirma le fort calibre de jeu des Nord-Américains en battant décisivement Springer par 3 gains et 2 nulles sur son jeu favori tandis qu'il faisait jeu égal au 100 cases. Le titre mondial (non reconnu par les Fédérations Européennes, puisque Hoogland était champion en titre) se perpétua ensuite au jeu Canadien par des matchs défis.
Suite au succès de Beauregard, les Européens n'eurent plus de nouvelles des joueurs Canadiens (ou Franco-Américains), jusqu'à la visite percutante de Raoul Dagenais et Marcel Deslauriers en Europe. Dagenais prit la 2e place au Championnat du Monde 1952 (sur 100 cases) non sans avoir battu le champion Piet Roozenburg. Deslauriers se contenta alors de la 9e place mais revint 4 ans plus tard pour remporter ce prestigieux titre mondial. Des exploits remarquables compte tenu du fait qu'ils ont dû s'adapter au jeu international (sur 100 cases) en peu de temps.
Les contacts et les succès de nos meilleurs Canadiens engendra la création ici (dans les années 50) de l'Association Internationale des Damistes d'Amérique (AIDA). Cette association organisa les premiers championnats sur 100 cases au Canada afin entre autres de déterminer nos représentants au Championnat du Monde. L'AIDA transféra ses droits en 1974 à l'Association québécoise des joueurs de dames qui venait d'être créée. La Fédération canadienne du jeu de dames international a pris naissance en 1984. Afin d'échanger avec nos homologues qui pratiquent le même jeu dans plus de 40 pays, l'Association québécoise des joueurs de dames effectue surtout la promotion du jeu international, mais accueille tous les adeptes. Marcel Deslauriers, après avoir perdu son titre en 1958 face au Soviétique Iser Kouperman (par 2 gains, 4 pertes et 14 nulles), représenta le Canada aux championnats du monde également en 1960, 1964, et 1972, en plus des tournois Brinta de 1965 et 1967 en Hollande. Quelques autres Canadiens ont depuis représenté le pays dans des compétitions internationales: Gaetan Gagnon (en Hollande en 1970, mais aussi au Challenge Mondial 1974 à Tbilissi en Georgie, ainsi qu'aux championnats Panaméricains), Gérard Lefebvre (en Hollande en 1973), Anatoly Veltman (aux championnats Panaméricains), Eddy Volel (en France vers 1984), Romain Tchicaya (championnat du monde 1990). Nous espérons effectuer un retour sous peu dans les compétitions internationales.